ROLAND SABATIER lettrisme

 

Roland Sabatier

TOUS LES ENFANTS NE SONT PAS

SUR LE CHEMIN DU LETTRISME (2007)

(symphonie esthapéïriste avec entrée au-dessus et final en face)


Ensemble composé de trois parties:

1- et 2- deux hypergraphies dans des encadrements dorés (17,5 x 12, 5 cm) dont l’une est disposée sur le dessus du piano, la seconde en face sur une cimaise ;

3- un piano droit ancien avec, dans la partie haute, au centre, un carton découpé ombré et peint en or (21,5 x 48,5 cm), un macaron émaillé et le titre imprimé ; un cahier de musique de 68 pages avec mentions des différents tempo musicaux ; plusieurs photos couleur – représentant une révolte d’étudiants à Jusieu – disposées sur les touches du piano et recouvertes partiellement de peinture rouge (sang) débordant sur le devant jusqu’au sol.

(Collection Francesco Conz, Vérone)


Dialogues du film vidéo réalisé en complément de l’œuvre et pour l’expliquer (interprété par l’auteur et Anne-Catherine Caron).

Générique.

(Sonnerie du téléphone).

Lui : — Le téléphone ! Répondez, Mademoiselle. Répondez, moi, je réfléchis.

Elle : — Allo,.. Allo… Pronto… Oui… Va bene, ne parlo con Sabatier.

(S’adressant à Lui) : — C’est Monsieur Conz, Monsieur, il veut savoir quand son piano sera terminé.

Lui : — Dites lui que je ne peux pas le lui dire. Je fais le travail. Le travail de la musique et du soulèvement de la jeunesse…

Elle (après un instant, répondant au téléphone) : — Signor Sabatier dice che non può dirliglio, sta facendo il lavoro. Il lavoro della musica e del soulèvement de la jeunesse…

Une voix lointaine : — Se superposant à des images banales, tous les signes imaginaires que vous ne voyez pas vous regardent dès l’instant où vous savez qu’ils sont sur l’image.

On entend un piano jouer durant quelques minutes.

Lui : — Ah ! non. Pas de piano. Pas de piano. Surtout pas de piano

(La musique cesse)

Elle : — Mais, je croyais bien faire, Monsieur !

Lui : — On ne peut plus, aujourd’hui, faire des histoires avec le piano qui, dans l’organologie musicale, ne sert qu’à traduire dans une manière particulière les sons élevés en hauteur.

Après Luigi Russolo, le futuriste italien, la musique n’a plus besoin de ce genre de sons, il lui faut des lettres, des lettres sonores, non conceptuelles, produites par la voix humaine.

(Il regarde un cahier sur les pages duquel sont écrits les différents tempo musicaux. A haute voix, il énumère : — fugatto, languido, larghetta, largo, agitato, lamentabile, ritardato, crescendo, pianissimo, dolce, fortissimo, andatinoamoroso, gracioso, andante, adagio, al dante, meno presto, crescendo, minuetto, agitato, fuhato,…ad libitum

(il reprend ) : — Au-delà, enfin, pour ceux qui savent, et pour eux seulement, ces sonorités se perdent elles-mêmes dans les chef-d’œuvres du lettrisme musical pour être remplacées par des sonorités imaginaires, in-inimaginaires, infinitésimales, impossibles ou virtuelles.

(silence)

C’est dans ce contexte que le piano peut survivre, en servant de tremplin indifférent à ces élaborations mentales, situées au-dehors de toutes beautés concrètes, dans le cadre d’une symphonie dont le titre permet de comprendre que le sujet est axé autour de la jeunesse et de l’économie nucléaire.

(silence)

Faute, pour tous les enfants de ne pas être sur le chemin incarné par les apports du lettrisme, l’œuvre se termine comme une évocation romantique, dans un flot de sang.

(silence)

S’adressant à elle : — Pouvez-vous traduire, Mademoiselle !

Elle : — E perché i bambini non sono tutti sulla strada del Lettrismo che l’opera finisce, come un’evocazione romantica, in una marea di sangue.

(après un temps de silence, elle reprend : — Mais alors, si j’ai bien compris, c’est parce que tous les enfants ne sont pas sur le chemin du lettrisme que ça ne va pas

Lui : — C’est exactement cela, Mademoiselle !

Elle : — Mais où place-t-on le final, Monsieur ?

Lui : — En face, Mademoiselle, en face, bien sûr !

Janvier- avril 2007


EXPOSITION :

Verona. Academia di Belle Arti G.B. Cignaroli : Pianoforti Lettristi 2007 (13-23 Avril) 2007.

Vérone. Palazzo Berbieri : Il Lettrismo a Verona (12-13 dicembre 2007)


BIBLIOGRAPHIE :

Concerto pour piano et lettristes, de Frédéric Acquaviva, in catalogue Pianoforti lettrisa, éd. Archivio F. Conz, Verone, 2007 (p.p. 29-31).






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